L 'ILLUSIONNISTE ...
" L'intumescence des mers s'élevait au diapason des violentes rafales. Le colure de l'équinoxe n'était qu'afflations, grands vents et tempêtes sous les soleils fugaces et enrochés "
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La mer exultait et dans la tempête semblait furieuse. Les vents ivres, comme fous, lançaient à la Côte leurs vagues hallucinantes ; tels étaient la scène et le théâtre des îles bordées de fosses sous-marines et des abysses insondables aux prises avec l'hiver, l'obscurité, l'inconnu des brisants aux rivages. L’eau et le vent sont indéchiffrables, insaisissables, incompressibles et les forces qu'ils décuplent à l’infini se propagent, invisibles dans les transparences des flux immaîtrisables… Le ciel abandonne aux souffles d’altitude leurs flèches de givre, ses embruns éthérés, les témoins et hérauts altiers des plus fortes turbulences de l’atmosphère.
Les marins en décryptaient tous les signes annonciateurs de coups de temps accordant au monde du silence tant de poésie et de crainte, l’allégeance religieuse et sacrée au flot et à la vastité des océans, tant d'humilité face à l'incertitude laissée au hasard.
Quand la mer des vents se déchaîne et se hérisse, dressant vers l’immensité des myriades de crêtes moutonneuses, elle prépare et apprête ses longs convois de messagères. Lancés de tous les lointains, des horizons contrariés, on les voit passer, élongeant les caps et les pointes de rochers déchiquetés, augurant çà et là de mille apothéoses et des plus éblouissantes éclosions de l'azur.
Mais le ciel des marins revêt parfois la peau du diable creusant en son sein des gouffres effrayants, ouvrant des gueules rugissantes et mugissantes. Et quand la splendeur, la munificence et les transports des éléments invitent à l’émerveillement, ils brandissent aussi l’arme fatale des forces de l’univers et du destin. L’homme ramené à l’inexorablement petit appréhende ce qu’il découvre et reconnaît en l’énergie magnifique : l’essence du mouvement originel dont il est partie prenante et infinitésimale.
Une vague terrifiante, défilait et toisait la colline. Les tourbillons et les révolins l’excédaient, semblait la soumettre et la commander. Elle n’en fit rien en gonflant et l'onde se souleva, très large, épaisse, massivement, tassée par le rempart de rochers qui s’élevait à son vent. Puis elle se mit à souffler, vague écumante, irisée par la moire lumineuse et ses longues traînées . Opaque, glauque, viride, l’onde colossale et vorace aspira, attira l’eau de la baie, l’engouffra telle une hydre gigantesque ; l’on vit toute l’eau refluer comme un torrent, la fluxion titanesque des forces lugubres et sous-marines accourant et se joignant à la pente abrupte et redoutable qui se précipitait. Opéra vertical, symphonie marine, ode des vents, une toile, un tableau naquit de l’haleine de la mer.
En un instant, l’univers eût basculé, l’antre empli de cette bave d’écume s’écroula, précipité dans sa chute dans un tonnerre et un grondement assourdissants. Entre nuages et volutes de mousse, veines d’eau et embruns, ellipses et orbes incessants, la vague n’en finissait plus de rouler, de fuser, de s’unir aux ciels.
De telles vagues se replient-elles pour mourir, consacrer parmi le chaos l’ultime dessein de l’azur immaculé ? Raviveraient-elles comme une offrande à tous les rivages, illusionnistes de l’eau primaire, la souvenance impérissable de la Genèse ?
Aura solennelle et souveraine signant l’icône pérennelle de l'autre rive, je vois en toi le feston lustral des cieux, l’immense baptême de l’eau au socle malléable et inachevé des siècles
!
1 ère Ecriture le 1.03.2012
2 ème Ecriture le 02.20.2014