L'ESSENCE D'UN BAISER !...
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A nos âmes, le fruit des sens qui les eût réunies et mêlées
Un baiser qui porterait au comble du vertige, uniment ; tendrement apposé, comme fondamentale et ultime communion. Un élan égaré, un faux pas hélas ! risqué ; le hasard qui eût peut-être parfait et gravé les choses ... L'effleurement pareil au souffle aveugle qui en accorde le frisson en ces lunes aux paupières closes et, ne laissant plus de durer ; l'instant fabulant l'éternité ; dussé-je nous recouvrir de penser, il eût alors suffi à l'Amour. Ô Choeur, gémir, murmure à l'unisson de la voie !
Ainsi de l'empreinte, le coeur insigne, toutes les fois qui attise l'unique foyer de nous embrasé ... le ciel en émoi infusé d'étranges vibrations ! A ce baiser, permettez-moi d'y adjoindre l'ovale de ces paumes jointes qui eussent à toujours recueilli nos rivages, comme on rassemble l'eau de la fontaine. Et ma bouche, de cueillir un sourire nimbé de boucles et de pétales au vent, s'unit. Rien de sensible n'aurait alors su rivaliser d'extase et de plénitude. En cet instant d'âme, sans âge ni autre entrave, j'aurais nommé la foi ; ainsi le soupçon d'un délire, le nôtre, insaisissable, parce que fluant des racines du ciel, fruition, fruit de l'absolu, à l'éternel dessein, la passion d'aimer, de mourir pour la première fois...
Ne m'aurait-elle jamais cerné, imaginé, qui sait, par trop deviné en ces inclinations mystiques, océaniques ! Certes Non ! Alors j'allais, lointainement, sans doute et sûrement. Errais-je comme un manant au seuil d'une jalousie refermée, s'entrouvant parfois, hésitante et fébrile, puis promptement rabattue tel le soufflet sur la flamme !
Oh mon Dieu, qu'il me fût doux d'en effleurer les clairevoies, le désir de nous, là, si profondément confié au monde du silence et qui m'eût aidé à en apaiser l'ardeur courant la pente de l'espérance...
Je garde aux tréfonds de la mémoire, ma muse, non la meurtrissure, l'amertume, mais l'immensurable bonheur d'une révélation ébauchée sans paroles : je lui en suis résolument reconnaissant pour rendre grâce au sort ; et jamais las de relater... Elle ne le saura pas, qu'importe, tandis que le jour et la nuit lui sont depuis voués, ô insensé, que n'es-tu chaviré !...
Ainsi des tempêtes de l'hiver en lesquelles, inlassablement, inéluctablement j'accours et me fonds ; puits en elles où me réfugier, oublier... Illusions d'une folie oscillant en silence, depuis l'absence, au roulis de la joie, au lent ballant du chagrin. L'amer que je vis passer, croisant au large d'une route déjà tracée, comme la destinée, me fut improbable écueil !
Dieu, comment une étincelle embrase-t-elle ainsi la mer ? Feu de paille ? Oh non !... J'en reste là depuis tant d'années ; las mais, dans l'attente, certainement naufragé ; l'amour ne saurait avoir d'âge, avoir vieilli. La sagesse et quelques mots mûris à l'aune de la souffrance y pourvoient quand ils sont de l'esprit. J'ouïs comme une perle de rosée, une larme s'épand, chue de la source ; alors de nos prunelles, l'une à l'autre confondues, abyssales et timides. Au souffle vénéré des clartés éternelles, l'onction caressante de l'instant ; Instant, Ô perpétuel compagnon qui m'eût octroyé le baiser d'un sourire .
Alors, fardeau de si mal durer, je t'en prie, délivre-moi de ce vague à l'âme !
Et si j'atteinds aux révélations comblées d'essence : un baiser renaît et suffit. Enfantement divin qui échoit au rêve solitaire. A l'orée chatoyante d'une voix, d'une toile, de la foi, poème et plain-chant, transe en danse où puiser dans les profondeurs du ciel, vers les sommets des abîmes tout l'amour du Monde, l'espoir qu'il fût, avec nous, tellement heureux
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