ELLE SERA MA DERNIÈRE THÉBAÏDE !...
DESSEIN
Je laisse à la lisière du sommeil muser un brin de musique, choisie ; quelques touches de piano m'élancent, sans voix, qui roulent et qui planent infiniment douces et délicates ; immersion, à l'orée d'un vaste champ aux étoiles solfiant leur éclatante partition.
Le corps à l'ancre, vain repos ! entre besoin et nécessité, hélas ! une chambre qui m'est si froide et s'esseule... Alors, de feindre toutes les fois le grand départ, sombrer. Puis vient l'éveil, vaporeux. Léger, je recouvre le fil de la mélodie qui me rendort aussitôt et m'élève ! ainsi, indéfiniment, des sens abreuvés de tout, de rien : souvenance. Une fois comblé de breuvages léthéens, les mots d'en bas abdiquent et s'effacent ; ces mots volés, bradés, bafoués et dévoyés qui expient afin que rêve et création abattent les murs denses des certitudes et des règnes !
Survient l'univers de la Musique, merveilleuse compagne, démesure sibylline à l'âme qui s'ente et me délivre du carcan. Tant de pesanteurs, de l'anathème aux représentations grevées des boulets et des images travesties, sont entraves.
Mais l'instant est à l'inépuisable source de cristal, aux accords innombrables qui me libèrent, irrépressible inclination à la mélodie !
Et quand de s'évader par les dédales voilés des vagues et des dunes ; en quêtant quelques clartés de solitude et de silence, je vogue. Survivrais-je au dessein et aux harmoniques qui eussent mené par le chant des dieux ? Là où le mot bute, la pensée commune blutant lasse et sans faim, au pied du mur, je me consumerais...
La musique accourt, prompte inlassablement à porter son message de plénitude, de saine guérison ... Il n'est point d'âge pour la nommer, en tracer les horizons et les contours ; la musique, c'est la raison un moment vaincue qui décroche, l'infini, l'intemporel, l'ultime verdict d'une rencontre, la margelle d'une prière, l'oraison d'un songe, la mer en allée, un amour immense !
Que l'intuition, l'imaginaire, par les baies grandes ouvertes de l'âme, rayonnent. Ainsi d' accorder au songe, au son, les grèves euphoniques de l'immensité ? Être alors renoue les liens brisés des menées sans coeur !...
Je ne parviens plus à ouvrir les yeux, je voudrais tant que le flux, l'ample vibration de l'air vagabondent encore et m'emportent loin, au large ; plus jamais de cette encre salissante aux doigts des maux qui griffent le parchemin des souffrances muettes, sans fautes qui eussent entâché la Voie ; je ne suis plus dès lors que vaste et blanche étendue, tombant vers l'essence où s'imprègnent et fusent les mélopées éthérées, je veux
dire la musique-alliance originelle tout autour de moi qui sourd comme une vision d'éternité. Mais quand la Musique mourra, qu'adviendra-t-il du voyage et de l'île ?...
Je reviens d'ailleurs, laissez-moi ! j'ai habité un visage, une île, là-bas une rencontre étrange, un nuage d'incessantes clartés m'aurait ailé pour un sourire ... je repars, ce sourire me manque, l'autre rive entonne en boucle un choeur si profond qui ondule, je n'attendais qu'elle, la tempête est là qui m'emporte, ô symphonie, cantique du ciel sans
heurt ni accroc, lavez mes blessures afin qu'éclosent en moi quelques arpents d'au-delà, l'aube des magiciens, toutes les légendes personnelles à l'orée d'un éclair, par la renaissance de l'accord nu que rien ne peut plier ni soumettre
!
DE MARIN A SAGESSE
En toute première et dernière Ecriture, le 00.00.0000
Repris le 13.07.2014