SENTINELLES DANS LA NUIT DES MARINS...
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Vigies éparses veilleurs au fond de la nuit profonde et obscure
L’homme et l’édifice se livraient aux grandes solitudes
Partageant les complaintes de la mer le chant des îles
Lancinantes silhouettes chandeliers de la mer coiffés d’embruns
D’antiques nécessités de hasardeux desseins
Ont accompagné vos défis au flot au voyage
Vous en êtes les lointains et fiables témoins
Vous fîtes le sort les récits et les fortunes de marins
Le cours des traversées la joie du retour
Ramenant les matelots aux nids choyés de chaque port
Gardiens que vous fûtes des promesses enivrantes
D’absinthe d’ambroisie d’étreintes délirantes
Dressés d’absences ridés d’angoisses de cauchemars
Ô phares qui au-delà des terres annoncez les brisants
Vous consommiez l’adieu le souvenir un sourire
Et reteniez si loin l’instant du départ et des larmes
Comme la langoureuse monodie du rivage battu
Éclaireurs providentiels aux ailes blanches éployées
Vos assises de roches sitôt submergées
Traçaient déjà la longue écharpe écumeuse le sillage
Aux confins des mirages azurés de la veille incommensurable
Comme une allégeance aux hallucinations vitales
Avec le maître de phare scellant les gonds la lancinante ascèse des coups de mer
Ne recouvriez-vous pas la force la vigueur de l’étrave
Clamant l’énergie de l’océan défiant la tempête et ses lames monstrueuses
Vous portiez si loin et si haut la bonne lumière des hommes
L’espoir scintillant de quelque amour prodigué
Sans lendemain ni nuit qu’auraient fredonné paisibles vos foyers
Voile blanc de vagues pulvérisées Ondes meurtrières
Rencontres éperdues majestueuses de la mer et de la terre déchirées
Aux violents courants remontant le temps fendant la durée
Je vois tout ce que vous gardiez de silences de dénuement et d’horizons esseulés
Et vers la nuit que seul l’éclat quiné perçait et pointait fébrile
Montait un plain chant douloureux d’âmes libres
L’attente dolente et affligée de craindre de redouter
Ces pauvres et parcimonieuses nourritures terrestres
Ou le deuil définitif qu’abîment à jamais les profondeurs
Phares qui avec les balises geigniez et pleuriez l’épave
Plaigniez au flot au jusant l’âme balancée des disparus
Aux frontières noyées de l’ au-delà et de ses dérives
Le marin à vos lueurs s’exclame s’arrime
Aux songes de terre et d’absolue fraternité
La messe est dite à l’aura des dames des tours embéguinées d'écume
Vous scandez le pouls de l’océan et vainquez de toutes limites
De durer autant que de guider le marin Justes et sans relâche
Grandit la devise les déraisons éthérées de l’aventure des hommes
Honte à ceux qui de vos vérités forgeaient la trahison
L’ignoble opprobre du traquenard la lâcheté du naufrage
Bien des serviteurs cupides et leurs époques noires ont trompé vos certitudes
Faisant de vos élans de bontés ces complices aux contrées tueuses Perpétré ces mensonges fatals
Et de la mer généreuse tristement flouée les naufragés subissaient
L’oracle implacable d’iniques sentences de terribles augures
Ô Phares qui gardez encore ce regard altier une fière allure
L’évocation oubliée de la vie retranchée adossée au grand large
Nous vous pleurons abandonnés sans âme et sans mains
Marins défunts au cœur de verre fantomatiques
Robots glacés figés de pierres tumulaires
Rejetés des hommes Vous êtes les derniers hérauts
D’un monde à la dérive inéluctable des continents
Raconteront-ils encore le flot la vague et la houle
Porteront-ils encore la tiède lumière dans la nuit océane
Tisseront-ils l’indéfectible faisceau qui parle au marin à son navire
Et pousse l'enfant perdu vers la terre odorante retrouvée
Les bâtisseurs de phares ont élevée la mémoire Agrippés
Aux rochers à l’assise d’un temps octroyé mesuré des marées
Pierre par pierre ils ont érigé les citadelles de la mer
Ces ultimes messagères ont obéie aux abysses concédé leurs disparus vers les Trépassés
Sentinelles incontournables des mondes à l’âme bienveillante miséricordieuse
Aux vastes cœurs de marins et d’éternels apôtres de la liberté
De l’amour et du respect indéfectible de la vie
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Cristian-Georges Campagnac
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